De la Première Guerre Mondiale ont surgit moult
chansons de tranchées car le poilu, ne pouvant raconter ce qu’il voyait et
vivait, pour garder le moral sous les obus, chantait volontiers sa condition
misérable. Certains de ces chants de guerre ont eu pour toile de fond Autrêches.
Ce texte,
composé durant l’hiver 1914-1915 par le soldat Charles Jeannier du 54e
régiment territorial, se chante sur l’air de « Viens Poupoule ».
Il y a deux
pays charmants,
C’est
Autrêches et Ch’vill’court,
Où
s’abritent ces maudits Allemands
Déjà depuis
d’longs jours
En bas, au
fond de la vallée,
Existait un
moulin,
Les canons
boch’s l’ont bombardé,
Il n’en
reste plus rien.
Près de la
roue tout’brisée
On va tous
s’débarbouiller
Viens von
Kluck ! viens von Kluck !
Viens !
Avec tous
tes canons,
Tes fameux
bataillons,
Ah !…
Viens von
Kluck ! viens von Kluck !
Viens !
Tu peux
faire tes adieux
A ces pays
mon vieux.
Dans les
tranchées de Chevill’court,
La nuit
comme le jour,
Qui c’est
qu’l’on voit d’vant les créneaux ?
C’sont les
territoriaux,
Des
bataillons du cinquant’quatre,
Toujours
prêts à se battre,
Car là,
derrière l’ancien moulin,
Les Boch’s
ne sont pas loin.
S’ils
essaient de s’approcher,
La mitraille
va cracher
Viens von
Kluck ! viens von Kluck !
Viens !
Les
mitrailleurs veillent bien
Tout autour
du moulin,
Ah !…
Viens von
Kluck ! Viens von Kluck !
Viens !
Pruneaux on
t’servira,
Pour toi et tes soldats.
Dans le secteur Sacy, Bonval,
Il y a un régiment,
C’est l’cinquant’quat’territorial
Qu’est toujours en avant ;
Il a la garde d’Saint-Victor,
Un’ferme démolie,
Qu’les boches ont transformée en fort,
Et où ils viennent la nuit.
Nos poilus surveillent bien
Le repaire de ces coquins.
Viens von Kluck ! Viens von Kluck !
Viens !
A Bonval, Saint-Victor,
Tu n’as qu’à faire le mort,
Ah !…
Viens von Kluck ! viens von Kluck !
Viens !
Le cinquant’quatre est là,
Von Kluck ne bronche pas.
Sur le plateau d’Vingré-Berry,
Par les plus froides nuits,
Qui c’est qu’était dans les tranchées ?
C’était les terrassiers
Du cinquant’quat’de Besançon,
Ce sont tous d’bons lurons,
Des gars du Doubs, d’l’Ain, du Jura
Des braves Franc-Comtois
D’Rhône et d’Loire réunis,
Ce sont de bons amis.
Viens von Kluck ! viens von Kluck !
Viens !
On t’attend cher ami,
A Vingré et Berry.
La ferme Saint Victor que Charles Jeannier cite
dans sa chanson fort joyeuse était occupée par les Allemands. Systématiquement
pilonnée par les Français, sa destruction fut totale lors du Grand Conflit.
Voici le refrain qui se chantait à l’époque, à propos de cette ferme, sur l’air
de « Sur les Toits de Paris » :
De la ferme de Saint Victor
Le soir quand tout s’endort
Quelques patrouillent allemandes, sans bruit
S’installent là pour passer la nuit
Mais tout à coup Schneider
Se met à fendre l’air
Et bientôt il n’y a plus que des morts
A la ferme Saint Victor
La ferme Saint Victor, construite au lieu dit le
Moulin à Vent, domine du haut du plateau le hameau de Hautebraye qui lui était
un campement français. Hélas pour les Allemands, même si le bord du talus offre
une charmante perspective sur Saint Christophe à Berry, Vic sur Aisne et
l’ensemble de la vallée de l’Aisne, il ne permet pas de voir ce qui se trouve
juste à ses pieds, c’est à dire le hameau qui est devenu ainsi la pensée quasi
obsessionnelle de l’envahisseur, à tel point que son 9e régiment
d’artillerie de campagne a immortalisé les lieux par une chanson de désespoir.
Hautebraye
Lied
(Melodie :
« Der letzte Frou-Frou » aus der Revue « Donnerwetter, tadellos ».)
Wie tobt hier an der Aisne die Schlacht
Seit Wochen schon bei Tag und Nacht,
Und immer müde schiesst der Feind,
Weil er es gar so böse meint.
In Erdeshöhlen kauern mir
Am Hungertuche nagen schier,
Und jeder Neuner denkt bei sich :
Wann wird es Ende mit dem Krieg ?
Ringsum so hört man es fragen :
Wo sind nur all die Français ?
Stille, ich will es euch sagen :
In Hautebraye, in Hautebraye, in Hautebraye.
Wenn doch das Nest nur erst brennte,
Der Giss von Herrn Poincaré,
Wär aller Kummer zu Ende.
Auf nach Hautebraye, nach Hautebraye !
La chanson de
Hautebraye
(Mélodie :
« le dernier Frou-Frou » de la revue « mille tonnerres, impeccable ».)